Bruno Pélassy



Né au Laos en 1966, Bruno Pélassy est mort en 2002 des suites du Sida, contracté à 21 ans. Si sa production est plutôt restreinte et de qualité inégale, sa force réside dans l’émotion qui la sous-tend, celle née de l’urgence qu’il y a à vivre et à créer, les deux activités apparaissant ici fermement liées. Artiste autodidacte formé à la joaillerie et au stylisme, Pélassy participe pleinement d’une scène niçoise turbulente, ouverte aux questions de genre et au travestissement des corps, en ces années 1990 marquées par la lutte contre le virus et le cortège de représentations qu’il véhicule. Créées dans l’intimité domestique, ses œuvres révèlent un goût personnel pour le travail manuel, le jeu des étoffes et la profusion de détails précieux, balancent du rire au tragique, et empruntent au vocabulaire ornemental sacré pour le mêler à une imagerie queer, volontiers provocatrice. Fragiles et précaires, elles sont parfois vouées à une inéluctable détérioration comme Sans titre, Sang titre, Cent titres (1995), film sur VHS dont l’image est malade, rongée par l’usure. D’avantage que les Bestioles à l’agitation dérisoire, l’ensemble le plus fort demeure celui des Créatures, mystérieux organismes aquatiques dont l’évanescence presque magique bouleverse à Passerelle, Brest, comme au Crédac, Ivry-sur-Seine, où le ton juste d’une scénographie mesurée a su être trouvé. Une belle monographie signée par Marie Canet accompagne le vaste projet en cours de reconnaissance de l’œuvre, également programmé au Crac, Sète et au Mamco, Genève.

In Artpress 421, avril 2015

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