Lo sguardo di Michelangelo. Antonioni e le arti

Palazzo dei Diamanti, Ferrare, mars – juillet 2013



Commissaire Dominique Païni

Un temps retardée par une série de tremblements de terre, la rétrospective Lo sguardo di Michelangelo. Antonioni e le arti s’est ouverte début mars à Ferrare. Elle est le résultat d’un travail pionnier au sein de l’important corpus d’archives personnelles que le cinéaste légua à sa ville natale, orienté selon un parti pris curatorial précis : la relation qu’entretint Antonioni avec les arts. La démarche ne surprend pas de la part de son commissaire, Dominique Païni, ancien directeur de La Cinémathèque française et théoricien du cinéma exposé. Plusieurs ingéniosités scénographiques servent le propos et font oublier les espaces parfois difficiles du magnifique Palazzo dei Diamanti. Dans un renversement qui donne le ton, la nécessaire traversée en plein air d’une aile à l’autre devient ainsi le prétexte à une installation poétique. On relèvera la subtilité de la mise en exposition des archives du cinéaste, de la grande présentation murale de sa collection de cartes postales à l’effigie de stars aux vitrines horizontales dans lesquelles sont agencées sur deux voire trois niveaux de lecture photographies, lettres originales et coupures de presse dans un système de contextualisation passionnant. Les figures de ses actrices phares – Lucia Bosè en état de grâce dans une œuvre d’Alain Fleischer, Monica Vitti telle une apparition évanescente – rythment les différentes périodes d’un parcours chronologique perturbé à ses débuts par une salle conçue comme un uppercut inaugural.

L’explosion cadencée de la scène finale de Zabriskie Point (1970) s’épanouit sur grand écran dans un parallèle réjouissant avec un dripping de Pollock. La mise en regard d’un Rothko de 1968 avec ce film qui imprime la rétine de ses grands espaces et de la soif d’évasion qui le traverse semble soudainement être du domaine de l’évidence. Une révélation plus loin entérinée par le rapprochement d’une combustion d’Alberto Burri avec des photogrammes du Désert rouge (1964), d’une piazza de Giorgio de Chirico avec une scène de L’Avventura (1960). Ces correspondances esthétiques ne doivent évidemment rien au hasard. La présence d’œuvres vues dans ses films ou de lettres échangées avec le bolonais Giorgio Morandi aide à rappeler la proximité qu’entretenait de fait Antonioni avec l’art de son temps. Le cinéaste travaillait lui-même des aquarelles de dimensions réduites aux teintes diluées, solaires, Montagnes enchantées dont il commença progressivement à développer des agrandissements photographiques. Une recherche plastique manifestement liée à l’œuvre filmique, de la mise en abyme du processus révélateur en jeu dans Blow up (1966) aux plans sur le désert de Profession : reporter (1975).

Dans le catalogue qui accompagne l’exposition, Dominique Païni postule que des différents mouvements qui jalonnent la carrière du cinéaste, « ce qui unifie l’ensemble (...) est une permanente posture de peintre ». Et que c’est précisément sur un plan esthétique, plutôt qu’idéologique, qu’éclate l’acuité contemporaine de l’œuvre antonionienne.

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